La route illuminée
"L'esprit est la réalisation créatrice de chaque instant, l'intégration du commencement et de la fin en une synthèse
dont la naissance et la signification se renouvellent à chaque instant" (Dane Rudhyar)
 
 
"Apprenez vos théories aussi bien que vous le pouvez puis mettez les de côté quand vous entrez en contact avec le vivant miracle de l'âme humaine." C.G Jung

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Le Thème astrologique, champ de l'expérience humaine

 

"Passage et dépassement"

Résumé et extraits du livre  "triptyque astrologique" de Dane Rudhyar
 
Pont - JacquesPour pouvoir parler des champs d'expériences que nous traversons sur la "route illuminée", il convient de donner la définition de la "nature" telle que l'expose Rudhyar dans "Triptyque astrologique".

Qu'est donc la nature ?

"C'est ce qui, vaincu par nous, s'enrichit du sens dans le moment même de notre victoire. Si l'on réalise cela, on peut parler de "l'Eternel féminin" et passer outre. Rester sur place sans avancer, c'est être pris au piège. Mais il n'y a pas moyen d'avancer en passant à côté de la nature. Il n'existe, pour l'homme sur terre, rien en dehors de la nature. Il n'y a qu'une manière d'avancer: c'est de la traverser, entièrement, sans s'arrêter."..."La nature n'est pas la vie; ce n'est pas la conscience."

"A la nature appartiennent les organismes où se révèle la vie."

"La nature est l'ensemble infiniment varié des systèmes d'organisation, depuis les atomes jusqu'aux galaxies, depuis les systèmes philosophiques jusqu'aux institutions politiques. C'est tout ce qui, après l'intégration existentielle, devra nécessairement se désintégrer au fil de cycles divers -jours et éons -."
"La nature est tout ce qui révèle une tendance vers le "moins", le présent qui devient le passé, le créé qui devient périmé".

"Dans le rapport étroit avec tout ce qui se dépotentialise et tombe sans cesse dans le passé, l'homme réalise en actes son humanité foncière en libérant un facteur additionnel qui crée toujours un "plus" que ce qu'il est."

"L'extension de son champ de conscience polarise l'entropie de la nature....L'homme s'élève, non pas en luttant contre la nature, mais par un transpercement qui dépasse mais aussi surmonte la résistance généralisée de cette nature.....

"La main traverse ou passe à travers l'eau. Après avoir expérimenté cette eau et sa fluidité,  elle en émerge en gardant son intégrité en tant que main, mais en ayant acquis la connaissance directe de l'élément fluide."

"Connaître, c'est prendre conscience à travers l'objet d'une expérience; c'est un transpercement (ou une transpénétration) qui permet à l'homme de ressentir directement, de façon palpable et totale, la masse, la fascination, les tourbillons dangereux de tout ce qui est nature. Après l'expérience totale, il en a terminé"....

"La personnalité humaine est le combat ; le corps humain (subtil aussi bien que physique) est le champ de bataille; l'âme, ce qui a déjà transpercé, qui est passé au-delà ; l'esprit, le butin qui suit la victoire, et Dieu, l'éternel dispensateur.

Il n'y a pas de véritable victoire si l'homme s'attache à des trophées matériels arrachés à la nature."...
Ces expériences sont des défis que l'homme doit affronter. "il doit être crucifié sur la croix de l'horizon et du méridien qui définit son champ d'expérience."...Partant du levant de son individualité,  (que symbolise l'Ascendant), l'homme doit faire au Nadir l'expérience du fondement de son être. Il s'élève ensuite graduellement, en sens inverse des aiguilles d'une montre, vers le Zénith d'autant plus rayonnant qu'il se base sur l'expérience d'abîmes qui se sont révélés châsses pour la présence du Dieu immanent".

Face aux douze grandes épreuves, l'homme a le choix de les rendre positives en prenant la direction du divin, soit de les refuser et "se laisser entraîner par l'avance fatidique des énergies de la nature vers le chaos".

L'épreuve de l'Isolement (1)

"Naître c'est devenir isolé. L'universel se particularise en devenant une entité qui évolue dans un espace et une période de temps qui lui sont propres". En naissant, l'individu va devoir grandir dans des conditions particulières physiques, sociales et culturelles. "Toute expérience est potentiellement une naissance" qui va se traduire par un sentiment d'isolement dès lors que l'individu va se distinguer de la norme. Cette expérience de l'isolement peut être vécue de façon positive ou de façon négative, soit en acceptant la lutte avec les forces de la nature, soit en la refusant.

Vivre l'expérience de façon négative, c'est se sentir isolé, écarté du monde qui nous entoure. Cela peut se traduire par une attitude de fuite, de refus de s'impliquer. Ou alors, l'individu convaincu de sa particularité originale, impose sa volonté, ses idées, persuadé qu'il est la norme.En fait il met des distances entre lui et les autres et crée un espace vide de sens.

L'expérience de l'isolement consécutive au défi de la distinction, de l'authenticité, revêt une forme positive.
 
Etre soi-même, vivre pleinement l'expérience de soi, ne met pas de distance entre soi et les autres. Cette expérience crée au contraire une forme stable, une "signature, une marque". Etre distinct, n'a pas la même signification qu'être différent.

Et Rudhyar exprime la notion d'isolement de cette façon :

"La créativité est le mariage avec le Divin. C'est l'isolement, mais un isolement illuminé par la conscience d'être totalement comblé par la présence de l'Un qui est aussi le Tout. Expérimenter cet isolement radieux, c'est être à tout moment un lever de soleil".
 
L'épreuve des Possessions (2)

"Toute naissance hérite de l'infinité du passé". Supposons "qu'un individu représente essentiellement un effort particulier de l'intelligence créatrice pour utiliser un élément du passé de l'univers afin de réaliser, dans un présent nouveau, un aspect encore inconnu du divin. La personne est donc la solution possible d'un problème pas encore résolu". Cette personne devra donc prendre conscience des "outils" et des "énergies" à sa disposition qui font partie d'elle. C'est ce que Rudhyar appelle ses "possessions".
 
Ces possessions concernent les valeurs sociales (richesse ou pauvreté), le physique, l'intellect, l'émotionnel. C'est avec ce bagage que l'expérience débute à la naissance ou à tout autre moment de l'existence. C'est à travers le test de la nature qu'il est possible d'évaluer le contenu de ce bagage.
Ce bagage est là et nous n'avons d'autre choix que de l'accepter en toute responsabilité. Lorsqu'il est lourd, nous avons bien sûr tendance à vouloir le rejeter, et même à pester contre la nature qui ne nous aurait pas gâtés.

L'erreur serait encore "d'identifier le moi avec ses possessions"

"L'homme ne crée pas l'énergie mais l'utilise".

"La nature a une fécondité instinctive, inconsciente. C'est le mode passé de l'activité universelle"

"Donc si l'homme ne se sent pas responsable des énergies à sa disposition, il cessera d'être homme."
Comment alors, et dans quel but utiliser ses possessions ? Question d'une actualité brûlante quand nous constatons de quelle manière nous utilisons les énergies de la nature à notre disposition. Quel sens dans des termes comme "croissance", surproduction. Quelle signification donner aux enquêtes sur le moral des consommateurs lié à leur façon de consommer ?

"Personne ne doit être considéré comme quelqu'un d'important à cause de ce qu'il possède mais seulement selon la façon dont il utilise tout ce qu'il possède"

Dans son sens spirituel, l'individualité doit se comprendre en terme de distinction, non pas de différence".

L'épreuve de la Pensée. (3)
 
Alors que la nature "suit la voie de la désintégration" (entropie), l'homme doit suivre celle de "l'intégration", d'où il sort "victorieux". Dans cette victoire, l'essentiel c'est la transmutation de la nature en intelligence. Cette transmutation produit ce qu'on appelle la pensée".

"Penser n'est pas dépenser l'énergie de la nature car la pensée n'est pas un mode d'énergie". Pour Rudhyar, "le processus réussi de la pensée comprime l'énergie en idées significatives" et cette énergie n'est ni quantifiable ni mesurable, mais qualitative". "C'est par la pensée que l'homme établit les fondations de son être dans le domaine de l'intelligence".

Penser est donc une participation à l'intelligence divine et un moyen de résoudre les problèmes liés à sa rencontre avec la nature.
L'homme et la nature se complètent car ils sont interdépendants. Ne pas le comprendre, c'est se diriger vers la défaite.

Tout comme la graine qui fait partie d'un organisme, l'homme, l'individu, possède ce potentiel de naissance ou renaissance dans un autre cycle, s'il sort victorieux de son passage à travers la nature.
Rudhyar estime que l'homme ne devrait pas s'identifier à la biosphère qui appartient en fait à son passé biologique.

Il devrait au contraire dépasser "ce champ inconscient" pour aller dans le "champ conscient de la noosphère, domaine de l'intelligence et du " mentat." L'homme tend ainsi vers sa libération car la pensée est hors du temps et de l'espace.
Quelle est alors la part d'ombre de l'intelligence ? C'est "l'intellectualité", qui est "intelligence soumise à l'entropie".

A cause de ses peurs, l'homme crée des dogmes, des systèmes, isole les éléments sans les relier les uns aux autres et se laisse entraîner par la force entropique de la nature.
Nous voyons bien actuellement que l'homme prend timidement conscience que sa façon de penser n'est plus valable.

L'épreuve de la stabilité (4)
 
C'est celle qui nous permet d'aller au plus profond de notre être, d'aller au centre, de trouver l'équilibre.
Rudhyar semble rejoindre Krishnamurti lorsqu'il nous dit d'arrêter de penser, de nous emplir la tête d'idées, de raisonnements incessants, de spécialisations qui ne font que brouiller notre vision de l'essentiel et qui nous font rester à la surface de toutes choses, à la surface de notre être. Tout cela n'est que bavardages et superficialités.

"Quand, où et comment un individu doit-il répondre à ce besoin de stabilité et accepter de s'arrêter ? C'est la question que pose Rudhyar.

"Pour s'élever il faut des fondations en profondeur" et toucher le centre de son être. C'est symboliquement le nadir dans le thème natal.

Nous voyons bien comment nos sociétés tentent de régler les problèmes en surface. Les problèmes de fond sont complètement ignorés. L'homme persiste à élaborer des techniques de plus en plus perfectionnées et de plus en plus réservées à des spécialistes. On nous parle sans cesse de sécurité, de protections mais qui ne sont que la démonstration du refus de la responsabilité individuelle et collective. La surconsommation poussée à l'extrême, non seulement détruit la planète mais infantilise les individus qui, au moindre grain de sable dans le rouage, tombent dans la dépression. Tout simplement parce qu'il n'y a aucune base solide et stable, aucune spiritualité.

Et Rudhyar de dire : "seul peut être vraiment homme celui qui sera capable de surmonter l'attrait de la surface et la sécurité de l'enracinement, celui qui aura le courage de mourir au soleil de midi pour atteindre, au plus profond de son être individuel, le soleil de minuit. Dans ces ténèbres sublimes, tous les hommes sont un ; toutes les voix, silence ; et toutes les servitudes, liberté absolue"
 
L'épreuve de la pureté (5)
 
"Etre pur, c'est agir en intermédiaire pour actualiser une énergie mais agir exclusivement selon le caractère essentiel de cette énergie et dans un but défini par un besoin humain". C'est utiliser les organes d'expression d'un pouvoir selon leur nature intrinsèque et le but dans lequel ils ont été créés. C'est agir parce qu'il est nécéssaire de le faire.

Un acte est pur s'il est totalement et exclusivement ce qu'il doit être, selon la nature de l'énergie qu'il libère".

Voilà comment Rudhyar définit la pureté dans le "Triptyque astrologique". L'épreuve de la pureté exige de l'authenticité dans la réalisation de soi. Contrairement à la nature, nous avons souvent le choix de nos actes, à moins d'agir par compulsion. Comment allons nous utiliser , par exemple, les énergies des planètes personnelles ? Si nous nous apercevons que nous utilisons ces énergies de manière déviée, nous devons faire un effort de compréhension afin de rétablir un équilibre, c'est à dire  faire vibrer cette force conformément à de qu'elle doit être vraiment. C'est à dire selon notre propre vérité. Lorsque nous parlons de "vérité", cela ne concerne pas bien sûr l'idée que nous pourrions avoir sur la question du mystère de l'univers tout entier. Ce ne serait pas raisonnable. Il semble essentiel de devoir se concentrer sur notre propre vérité, c'est à dire découvrir pour mettre en action la part d'énergie contenue en nous en conformité avec notre destinée.

Nous pourrions comprendre notre destinée comme une fatalité, c'est à dire que notre vie serait tracée, définie à l'avance et ainsi nous n'aurions d'autres choix que de la vivre selon un plan défini à l'avance. Ce ne doit pas être aussi simple que cela. Nous sommes probablement guidés par des forces inconscientes, innées, héritées,  qui peuvent être l'expression de compulsions ou qui répondent à des besoins qui n'ont, au fond plus aucun intérêt. Mais lorsque le processus de désir de donner du sens s'est engagé, l'instinctif et le compulsif passent progressivement au second plan pour laisser place à ce que Rudhyar appelle " l'homme Prométhée ", c'est à dire l'homme qui réfléchit avant d'agir et qui prend toute la mesure de ses actes dans un équilibre entre les forces qu'il porte et celle du tout. Il ne réfléchit pas dans un but égoïste. Nous devrions ressentir la nécessité d'agir conformément à ce que nous sommes réellement. Alors si nous ne nous sentons pas concerné par le passé, nous devons au moins nous sentir responsable de le transformer, maintenant, pour un futur vraiment humain.

Notre système solaire est l'expression symbolique de cette authenticité-vérité. On peut relire "le cycle de la lunaison" de Rudhyar pour saisir comment se déroule le processus cyclique et tout le sens dont il est porteur.

L'épreuve de la souffrance (6)
 
"La souffrance est l'ombre de sa vie non vécue, l'effet de la potentialité non réalisée, le contre-coup de l'énergie non dépensée." Rudhyar rappelle les paroles du Christ : "si vous aviez su comment souffrir, vous n'auriez pas eu à souffrir".

"Mettre la souffrance au service de la résurrection, c'est l'essence de la vie spirituelle pour l'homme individualisé".

Et pour cela, il faut  du "courage",  évaluer les causes de la défaite et du détachement émotionnel vis à vis du passé"

Aujourd'hui, avec l'évolution des techniques, les médias nous informent en temps réel de ce qui se passe dans le monde entier. La part sombre de l'humain nous est largement montrée. C'est "vendeur" et il y a suffisamment "d'acheteurs".

Et trop nombreux sont les individus qui se lamentent et versent une petite larme à la vision de toutes ces horreurs, sans même se rendre compte qu'ils portent en eux une part de responsabilité (petite ou grande). Car nos actes et nos paroles sont porteurs d'une énergie qui se transforme en faits réels. Nous seront touchés d'une manière ou d'une autre et  douleurs physiques ou souffrances psychologiques seront en nous.  Plus nous sommes informés de ces faits et moins nous sommes excusables de ne pas changer nos comportements.

Si comme le dit Rudhyar, "la douleur est le gardien de trésors non encore découverts", nous devrions écouter ce qu'elle  a à nous dire.  Décoder le message de la douleur,  permet de dépasser l'idée qu'il y a des dominants et des dominés (ceci est du domaine de la nature) et qu'il y a des récompenses et punitions (ceci est du domaine de la religion).

Les causes de souffrance sont nombreuses. Il faudrait les comprendre, les transformer : ceci est du domaine de la résurrection. Comment avancer sur le chemin de l'évolution de conscience si nous nous complaisons à nous plaindre et si nous accusons les autres de tous les maux qui nous concernent ? Cette démarche personnelle de compréhension est parfois très difficile et demande du courage.
 
 
L'épreuve de la mutualité (7)
 
Nous vivons au temps d'une mondialisation qui se manifeste surtout par des échanges commerciaux dans une lutte âpre de domination. Qu'en est-il alors de l'esprit de mutualité dont Rudhyar nous parle ici avec tout son talent de musicien.

"L'espace n'est pas un vide passif, un vase sans fond. L'espace est un ensemble de rapports où toute chose est reliée  à tout ce qui l'entoure dans une mutualité éternelle et totale. Ce qui est projeté dans l'espace revient, ramenant en quelque sorte le monde entier qu'il a traversé, comme une caisse de résonance renvoie les sons en y ajoutant de nombreux harmoniques. Chaque corde de la harpe de l'univers suscite la résonance de toutes les autres cordes. Pour l'égo, cette résonance est le karma; pour le sage, c'est l'amour."

L'histoire des hommes, malgré tous les drames qui se sont joués et qui se jouent encore,  montre qu'il est possible de vivre en harmonie, dans un échange d'idées, de cultures, de savoir. Rudhyar l'écrit de cette manière : "Partager, tout en demeurant distinct ; être harmonie, tout en conservant l'indivisibilité du Soi : utiliser sa puissance innée, sans rien perdre d'une sagesse objective ; nager rythmiquement avec les marées de la vie, tout en étant sûr de cette individualité inaliénable garantie par la présence du Dieu intérieur; aimer, mais en paix; tout donner mais augmenter sans cesse la substance de son être extérieur; telles sont quelques unes des nombreuses phases qu'implique le test de la mutualité. Ce test s'applique à notre plus poignant désir, le désir d'aimer".

L'épreuve de la responsabilité (8)
 
La vie trans-personnelle ne peut avoir lieu si l'homme ne se sent pas responsable. Quel que soit le rôle que nous avons dans la société, nous sommes responsables.

"Tout esprit incarné dans un corps humain a la responsabilité fondamentale de créer sans cesse car la création est simplement l'actualisation, par l'Esprit, de la potentialité inhérente à chaque instant."
Lorsque nous naissons, nous portons en nous certaines qualités d'énergies que nous allons devoir utiliser et comprendre pour "être" ce que nous sommes. Elles sont notre "karma" et notre "dharma". Nous ne devons pas refuser de rencontrer ce qui est mais au contraire l'intégrer et l'actualiser. Il est préférable de se tromper en agissant que de ne rien faire. C'est notre responsabilité. Que nous le voulions ou non, nous sommes liés les uns aux autres. Tout acte accompli individuellement a une incidence sur l'humanité toute entière. Bien entendu, il ne s'agit pas de se sentir responsable de tout ce qui se passe sur terre, ce qui mènerait à une sorte de sentiment de culpabilité, mais simplement agir dans le cadre de sa propre vie, ce qui n'est déjà pas si mal. Cela implique notre responsabilité en tant que parents, employé, chef d'entreprise, élu et ainsi de suite.

L'épreuve de la signification (9)
 
"Lorsque l'homme a affronté des tests de la mutualité et de la responsabilité, le pouvoir intégrateur de la pensée donne naissance à une nouvelle phase de l'intelligence : la signification, c'est à dire la faculté de découvrir le sens de l'existence, et de ce qu'elle nous apporte. La signification d'un fait ou d'une entité découle de l'expérience de mutualité avec cette entité, et surtout de nos efforts pour résoudre les problèmes, harmoniser les conflits et assumer les responsabilités qu'implique cette relation."

L'idéal serait que nous puissions agir en donnant une véritable signification à nos actes. Et si nous ne le faisons pas systématiquement, c'est bien la preuve que cette étape ne peut s'affranchir des étapes précédentes.

L'homme a besoin, par exemple, d'élaborer des lois dans un but de vie en harmonie. La loi est en général porteuse de sens. Pourtant, le fait de placer en détention des délinquants dans le seul but de les punir ou de s'en débarrasser un certain temps, n'a aucune signification. Si la loi n'est pas accompagnée d'un travail en amont et en aval, cela n'a aucune valeur et donc aucun sens. De même que légiférer à outrance ne sert qu'à priver les individus de leur responsabilité et à les maintenir dans des comportements infantiles.
Aujourd'hui nous assistons à une débauche de technologies qui n'ont bien souvent qu'un intérêt commercial pour ceux qui les inventent, mais qui n'ont aucune signification pour ceux qui les utilisent comme des jouets. Tout ceci détourne l'homme du véritable sens de sa vie.

En tant qu'individus limités, essayons "plutôt de réaliser objectivement le "je suis" intérieur (ce soi) à travers des activités caractéristiques, dans la limite d'utilisation possible de nos pouvoirs innés".

Epreuve de la position (10)
 
Nous voici arrivés à la 10ème étape et pour nous résumer, nous pouvons dire que tout commence à la naissance : je suis un individu isolé, possédant un acquis que je vais utiliser en apprenant le fonctionnement des associations d'idées. Je vais devoir donner stabilité à cette individualité, en étant à la fois conscient de la réalité extérieure et des racines en profondeur que je vais exprimer d'une façon qui m'est propre. Si ces phases n'ont pas été correctement réalisées, je vais devoir  rencontrer certaines souffrances, ce qui devrait me conduire à rectifier certaines pensées et comportements, d'effectuer une certaine discipline, un travail de perfectionnement. De là, naît l'objectivité qui permettra une meilleure mutualité elle même génératrice d'une bonne récolte. Si cela a été bien géré de manière responsable, elle sera partagée dans la compréhension.

Ainsi, c'est dans la phase de position que l'on peut dire que "les partenaires se sentent intégrés à leur culture, leur religion et à leur société dans l'interdépendance de relations qui "font sens" parce qu'elles se rapportent à un tout harmonieux en constant devenir".

Les sociétés dites démocratiques, ne le sont pas. Pourquoi ? parce seuls les égos sont nourris d'une seule perspective de profit personnels. La concurrence acharnée pour le "toujours plus" permet une consommation inutile d'énergie, qu'elle soit de la nature elle-même ou des individus eux-mêmes. Les hommes passent plus de temps à lutter pour conserver leur position sociale, leur travail, qu'à créer les conditions propices à leur développement harmonieux.

Alors que l'individu devrait pouvoir "rayonner" au zénith du cycle, c'est à dire éclairer de son expérience créatrice, il ne fait que se glorifier d'une réussite matérielle, qui n'est en fait qu'une victoire illusoire sur la nature entropique.

Epreuve du mécontentement (11)
 
Krishnamurti nous disait avec raison que l'homme avait essayé le "communisme" et qu'il avait échoué. Il a essayé le capitalisme et nous constatons qu'il a aussi échoué. Il faudra donc trouver autre chose qui permette à chaque individu de se réaliser, dans sa diversité et non dans un modèle unique. Pour cela il faudrait probablement que l'homme "change radicalement".

Nous sommes donc face à deux grands idéaux dont l'un a tué l'esprit d'entreprise et l'essor des individualités,et dont l'autre l'a porté au nues permettant l'avènement d'une société individualiste et égoïste.

Aussi bien l'un que l'autre, ces systèmes ont provoqué de grandes souffrances parmi les hommes et conduit à des revendications et révolutions bien plus porteuses de mort que de renouveau. Alors nous pestons, chacun dans notre sphère contre le comportement des uns et des autres, contre nos dirigeants. Nous pourrions énumérer à l'infini toutes les "bonnes" raisons que nous aurions de nous plaindre.
Or notre mécontentement peut s'exprimer d'une autre façon. Laissons tomber ce qui n'a plus de sens pour nous, c'est à dire tout ce qui nous fait gaspiller de l'énergie inutilement. Au lieu de tourner ce mécontentement vers l'extérieur, nous pourrions porter un regard à l'intérieur de nous-mêmes et rechercher la ou les causes de nos propres souffrances.

Rudhyar évoque la présence de deux forces qui s'expriment différemment. La force centripète, qui conduit au "collectivisme" et qui prend la forme d'un cercle fermé, expression de la perfection mais qui en fait n'est que passagère et éphémère. Et la force centrifuge, qui donne l'impulsion pour sortir du cercle et qui prend la forme d'une spirale, ouverte à toutes les évolutions. L'homme "mécontent" est porteur d'une énergie centrifuge.

"Ces mutations valables représentent le triomphe de la vie créatrice sur l'automatisme des instincts. Ce sont les révolutions réussies, les grandes crises de transformation spirituelle qui donne à l'humanité générique et non encore individualisée, la preuve de sa croissance."

L'épreuve de la clôture (12)
 
A la fin de toute expérience, qu'elle soit heureuse ou malheureuse, il nous faudrait tenter d'y trouver une signification, de manière à ne pas la rendre inutile, sans valeur et sans espoir.
"Le véritable progrès réside dans l'expansion constante, le raffinement et l'expression des valeurs humaines"

Il y a forcément dans toute expérience une forme valable qui servira de base à toute forme future. Rejeter l'ancien ne veut pas dire tout rejeter mais au contraire utiliser ce qui est né du véritable esprit pour l'intégrer dans la forme à venir et lui permettre d'accompagner ce qui est en gestation. C'est ainsi que la plante qui meurt et qui retourne dans le tout, ne meurt pas vraiment parce qu'elle a laissé une graine contenant le potentiel d'une plante nouvelle.

"Toute naissance est la solution de problèmes engendrés par une mort précédente."

Pour exprimer le sens de la "clôture", Rudhyar le fait comme un musicien :
"Un grand artiste charge le moment qui suit immédiatement la fin de sa prestation d'une qualité d'émotion ou d'un état d'âme inexprimable et indestructible. L'élément le plus significatif dans le développement d'une oeuvre orchestrale n'est pas la suite formelle d'une multitude de sons complexes, mais le silence après le dernier accord dont les  harmoniques continuent à vibrer dans l'âme. Ces harmoniques, le silence qui suit un discours, la qualité du moment après qu'un coeur a cessé de battre : c'est dans ces impondérables que se révèle la valeur. Cette révélation devient semence transcendante qui imprègne l'âme universelle, et le silence qui suit un tel dénouement est tellement chargé de sens que Dieu lui-même s'en souviendra à jamais. Cette mémoire divine constitue la substance de notre immortalité."

Et il le fait également à la manière du peintre :

"Le peintre qui désire décrire le lever de soleil ou une scène symbolique psychologiquement équivalente, ne couvre pas son tableau d'une lumière dorée ; ou bien si la lumière est concentrée en un point de la peinture, il ne "répudie" pas les autres parties non éclairées ; il ne les rejette pas de sa conscience et de celle du spectateur. Il établit au contraire un contraste significatif entre les parties éclairées et les parties sombres. Il les relie dans une perception globalisante au sein de laquelle les deux ont une signification".